Comme nous vous l'indiquions dans un précédent article, l'entraînement avec instabilité est supposé augmenter l'activité musculaire en comparaison à un entraînement sur surface stable. Les partisans des surfaces instables en déduisent alors un intérêt pour induire un stress plus important pour le système neuromusculaire, aider à la prévention des blessures, la rééducation, la coordination, l'équilibre, etc. Cependant toutes les études ne confirment pas l'hypothèse d'une activation plus forte lorsqu'il y a instabilité. De plus, cette recherche d'instabilité dans l'entraînement peut mener à des pratiques extrêmes et dangereuses, pas toujours justifiées par rapport à la discipline de l'athlète...
Figure 1. Le développé couché, un exercice populaire pour le renforcement du haut du corps.
Le développé couché est un des exercices les plus populaires et les plus utilisés pour le renforcement musculaire du haut du corps à la fois chez les athlètes comme chez les sportifs occasionnels. Plusieurs études ont étudié son éxécution sur différentes surfaces et les résultats n'ont pas été concluants, essentiellement car les protocoles étaient différents et que les chercheurs comparaient des charges absolues identiques. Or, plus l'instabilité est grande, moins la force développée sera importante.
Enfin, pour les études qui comparaient des intensités relatives identiques, le type d'effort analysé était soit maximal (1RM) soit isométrique. Cependant, qu'en est-il de l'effet de l'instabilité sur l'activation musculaire lors d'une série à une intensité plus régulièrement utilisée à l'entraînement (e.g., 6-12 RM) ?
Pour répondre à cette question, une équipe de chercheurs norvégiens a voulu comparé une série de 6 répétitions lors d'un développé couché dans 3 conditions présentant une instabilité différente.
Pour cette étude, 16 hommes, tous pratiquants de musculation réguliers, ont participé. Un des critères de sélection était que chaque personne devait avoir un 1RM au développé couché supérieur à sa propre masse corporelle. Le protocole consistait à tester chaque sujet pour déterminer la charge maximale qu'il pourrait soulever 6 fois (i.e., le 6RM) dans 3 conditions différentes,le tout réalisé dans un ordre aléatoire :
Figure 2. Développé couché en condition stable sur banc.
Figure 3. Développé couché en condition instable sur banc avec coussin de proprioception.
Figure 4. Développé couché en condition instable sur Swiss Ball.
Durant les tests pour évaluer le 6RM dans les différentes conditions d'instabilité, l'activité électrique de surface des musles grand pectoral, deltoïde antérieur, triceps brachial, biceps brachial, droit de l'abdomen, oblique externe de l'abdomen et érecteurs du rachis étaient mesurée grâce à des électrodes placées sur la peau.
Les principaux résultats de cette étude montrent sans surprises que la charge relative de 6RM diminue lors de l'exécution sur surface instable (i.e., coussin de proprioception et Swiss Ball) en comparaison à une surface stable (i.e., banc) (Fig. 5). Cependant, l'étude électromyographique montre que l'activation musculaire du grand pectoral et du triceps brachial était supérieure lors du développé couché sur banc (i.e., la condition stable) par rapport aux deux conditions instables (Fig. 6). Cela signifie que la plus grande instabilité procurée par ces accessoires ne compense pas la charge absolue plus faible (85 kg vs. 78.5-79 kg).
Concernant les muscles du tronc, les résultats de l'analyse EMG ne montrent que très peu de différences entre les conditions. Il est généralement attendu que l'instabilité induise une nécessité pour le corps d'assurer une base solide en contractant les muscles stabilisateurs pour lui permettre d'exécuter le mouvement avec plus d'efficacité. La seule différence significative observée se trouve au niveau du muscle droit de l'abdomen lors de l'éxécution sur Swiss Ball. Cela est sûrement du au fait que c'est la plus instable des conditions, puisque seul le haut du dos est supporté et que le Swiss Ball peut rouler dans toutes les directions.
Finalement, les résultats de cette étude montrent qu'il n'est pas forcément nécessaire d'introduire une surface instable dans l'exécution d'un exercice de musculation lorsque la charge soulevée lors de celui-ci est suffisamment importante (sans être pour autant maximale). Au niveau de l'activation musculaire, l'instabilité ne semble pas compenser la perte de force. Lorsque l'intensité est suffisante, le contrôle du déplacement de la charge lors de l'éxécution du développé couché nécessite un recrutement suffisament important des muscles moteurs mais également stabilisateurs.
Il est important de garder à l'esprit que ces résultats sont applicables essentiellement chez des personnes pratiquant régulièrement un entraînement en musculation. Pour des personnes sédentaires ou en rééducation, il est possible d'envisager un système de progression en commençant avec des charges relativement faibles sur des surfaces instables et à mesure que la force augmenterait, de passer sur des surfaces de plus en plus stables.
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