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Les besoins en sommeil chez les athlètes de haut-niveau

par A. Manolova | 18 Janvier 2022

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Même s'il n'est pas encore pleinement compris, le rôle du sommeil est primordial à notre bon fonctionnement, autant sur le plan physiologique que sur le plan psychologique. Le sommeil est important pour la conservation de l'énergie, la récupération du système nerveux, les mécanismes de défense et le maintien d'une performance sportive optimale. La quantité de sommeil minimale nécessaire pour maintenir ces fonctions est donc une question centrale pour la performance sportive de haut-niveau.

La fondation nationale américaine pour le sommeil (US National Sleep Foundation) recommande entre 8 et 10 heures de sommeil par nuit pour les adolescents (14-17 ans), entre 7 et 9 heures de sommeil par nuit pour les jeunes adultes (18-25 ans) et entre 7 et 8 heures de sommeil pour les autres adultes (26-64 ans). Différentes études ont déjà observé que la quantité de sommeil chez les athlètes de haut-niveau était souvent insuffisante au regard de ces recommandations. Toutefois, ces indications sont très générales et ne tiennent pas compte des différences inter-individuelles dans les besoins en sommeil de chaque athlète et dans l'impact que le manque de sommeil peut avoir sur la performance, certains athlètes supportant mieux que d'autres. Qu'en est-il vraiment ?

L'étude réalisée

Pour tenter d'en savoir plus, des chercheurs australiens ont étudié les habitudes de sommeil de 175 athlètes de haut-niveau (30 femmes et 145 hommes) appartenant à 12 disciplines sportives (football australien, basketball, cricket, kayak, marche athlétique, vélo tout-terrain, cyclisme sur route, rugby à XV, football, natation, cyclisme sur piste et triathlon). Tous les athlètes appartenaient à leur équipe nationale respective. Les sportifs qui ont participé à cette étude étaient volontaires, la demande venant souvent du staff technique souhaitant en savoir plus sur l'optimisation du sommeil chez leurs sportifs. Parmi ces athlètes, 11 étaient considérés comme adolescents, 128 comme jeunes adultes et 26 comme adultes.

Les chercheurs ont étudié le sommeil des athlètes sur un minimum de 4 nuits consécutives en combinant 2 méthodes : 1) une méthode simple avec papier et crayon pour noter chaque soir, l'heure à laquelle le sportif s'allonge pour dormir et l'heure à laquelle le sportif se lève de son lit. Et 2) grâce à un moniteur d'activité (Actiwatch-64 et Actical Z-series, Philips) porté au poignet, le début du sommeil, la fin du sommeil et le nombre d'heures de sommeil ont été enregistrés. Ces bracelets ont été validés scientifiquement en comparaison à la polysomnographie (étude du sommeil en laboratoire).

En plus de ces enregistrements, les scientifiques ont demandé à chaque athlète de répondre à quelques questions :

  • Combien d'heures vous sont nécessaires pour vous sentir pleinement reposé ?
  • Sur une échelle de 1 à 10, à quel point êtes-vous satisfait de la quantité de sommeil actuelle que vous obtenez (1 étant très insatisfait et 10, très satisfait) ?
  • Sur une échelle de 1 à 6, de manière globalement, quelle note donneriez-vous à la qualité de votre sommeil (1 correspondant à très pauvre et 6, à excellent) ?
  • Aucune manipulation de l'entraînement n'a été effectué pour les conditions de cette étude. Les athlètes suivaient leur routine habituelle et consommaient leurs suppléments habituels (aucune limitation de caféine, par exemple). Les siestes n'étaient pas prises en compte. Aucun athlète ne dormait en altitude, ni ne souffrait de troubles du sommeil.

Résultats & Analyses

Finalement, les athlètes ont été suivis en moyenne sur 12 ± 4 nuits et les principaux résultats montrent qu'en moyenne, la durée de sommeil par nuit est de 6.7 ± 0.8 heures, et qu'elle est significativement inférieure à la durée que les sportifs estiment eux-mêmes nécessaire (8.3 ± 0.9 heures). Les recommandations générales de 7 à 9 heures de sommeil par nuit ne sont ici pas respectées, avec des besoins individuels à évaluer. En termes de valeurs maximales, un athlète a déclaré avoir besoin de seulement 5h30 de sommeil alors que deux autres, de 11 heures.

Figure 1. Pourcentage d'athlètes en fonction des heures de sommeil.

En moyenne, les athlètes s'endormaient vers 23h24 ± 0h42 et se réveillaient vers 7h18 ± 0h48. Concernant leur satisfaction de la quantité de sommeil obtenue, les athlètes ont noté 6.8 ± 1.6 / 10. Concernant la qualité de leur sommeil, ils ont attribué une note de 3.9 ± 0.9 /6. Seuls 3% des athlètes obtenaient la quantité de sommeil qu'ils désiraient, et 71% des athlètes dormaient au minimum 1 heure de moins que ce qu'ils souhaiteraient. Le déficit de sommeil moyen (c’est-à-dire, la différence entre la quantité de sommeil souhaitée et la quantité réellement dormie) était de 96 ± 60.6 minutes.

Les athlètes pratiquant un sport individuel s'endormaient plus tôt et se levaient plus tôt en comparaison à ceux pratiquant un sport d'équipe. Néanmoins, les sportifs individuels dormaient moins longtemps. Les triathlètes étaient ceux qui dormaient le moins, et les rugbymen, ceux qui dormaient le plus. Mais aucune différence n'était observée concernant le besoin idéal de sommeil, la qualité du sommeil et la satisfaction de la quantité de sommeil obtenue. Enfin, aucune différence n'a été observée entre les femmes et les hommes.

Applications pratiques

Ces résultats sont intéressants puisqu'ils montrent le décalage existant entre la quantité de sommeil que les athlètes souhaiteraient et les heures réellement dormies lors d'une période normale de leur carrière sportive. Bien sûr, même si les bracelets ont été validés en comparaison à la polysomnographie, il n'en reste pas moins qu'il existe un décalage dans les mesures observées. Les auteurs de l'étude indiquent que ces bracelets peuvent surestimer le sommeil de 18 ± 52 minutes et le sous-estimer de 54 ± 36 minutes. Il est donc important de prendre en compte ces niveaux de précisions lorsqu'il s'agit d'interpréter les résultats et surtout coupler ces mesures à des questionnaires sur la qualité du sommeil. Un autre point à observer est que cette étude n'a pas pris en compte si les sportifs réalisaient des siestes pendant la journée (ce qui est en général une bonne façon d'augmenter son capital sommeil), et donc potentiellement, a sous-estimé la durée du sommeil. Cependant, d'autres études ont montré que la fréquence des siestes était faible chez les athlètes de haut-niveau et qu'elle n'augmentait pas suffisamment la durée totale de sommeil.

Des études ont montré qu'une à deux nuits avec 3-5 heures de sommeil impactaient négativement la performance sportive. Mais quel est impact d'un déficit de sommeil léger à moyen- et à long-termes ? Des études chez des sédentaires ont montré que 7 nuits avec 5 et 7 heures de sommeil, diminuaient le temps de réponse de 23% et de 12%, respectivement, en comparaison à des nuits de 9h de sommeil. Et 14 nuits à 6 heures de sommeil augmentaient le taux d'erreur de réponses chronométrées de 177% en comparaison à des nuits de 8 heures de sommeil. Dans cette études, 71% des athlètes n'obtiennent pas la quantité de sommeil qu'ils désirent et 38% des athlètes ont dormi moins de 6h30 durant 12 ± 4 nuits. Cela pourrait impacter le niveau de performance cognitif et physique, mais ce ne sont malheureusement que des suppositions puisqu'il faudra attendre des études randomisées contrôlées sur d'assez longues périodes pour voir l'impact de l'optimisation du sommeil sur la performance sportive.

Plusieurs stratégies sont alors possibles pour augmenter le temps de sommeil : 1) retarder les entraînements matinaux si possible, 2) définir avec l'athlète une fenêtre horaire à respecter pour s'endormir entre 22h et 22h30, par exemple. Et dans ce cas, il peut être envisager, si cela est possible, une réorganisation des entraînements en fin de journée. Tout cela reste bien entendu théorique et à adapter en fonction des besoins personnels de l'athlète, de la discipline sportive, des disponibilités des lieux d'entraînement, etc.

Références

  1. Sargent C, Lastella M, Halson SL and Roach GD. How much sleep does an elite athlete need ? Int J Sports Physiol Perf 16 : 1746-1757, 2021.

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