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Hypertrophie et protection des ischio-jambiers : leg curl assis vs. allongé

par P. Debraux | 9 Août 2022

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Les muscles ischio-jambiers : semi-membraneux, semi-tendineux et biceps fémoral.

Figure 1. Les muscles ischio-jambiers... (Cliquez sur l'image pour l'agrandir)

Les ischio-jambiers sont des muscles qui constituent la loge postérieure de la cuisse. C’est groupe musculaire polyarticulaire composé de la longue portion du biceps fémoral (bi-articulaire), de la courte portion du biceps fémoral (mono-articulaire), du semitendineux (bi-articulaire) et du semi-membraneux (bi-articulaire) (Fig. 1). Du fait de leur passage au niveau de la hanche et du genou, ils agissent comme extenseurs de la hanche (à l’exception de la courte portion du biceps fémoral) et comme fléchisseurs du genou.

Dans de précédents articles, nous avons déjà abordé l’importance du travail sur les ischio-jambiers pour la prévention et la rééducation des blessures de genoux, et les différences d’activation de ces muscles en fonction de l’exercice sélectionné. Le renforcement de ces muscles bénéficierait également à la performance lors de sprints et pourrait réduire leur risque de déchirure musculaire.

Cependant, pour développer la force et la masse musculaire, il existe de nombreuses variables à prendre en compte. Dans de précédents articles, nous avons déjà discuté du volume, de la fréquence, du tempo et de l’entraînement à l’échec. Une variable qui reste souvent sous-estimée et dont la mise en application est souvent incertaine est le choix des exercices pour renforcer un groupe musculaire donné. Dans le cas des ischio-jambiers, il existe de nombreux exercices qui permettent de les solliciter. Parmi eux, l’exercice du leg curl est un exercice commun permettant de renforcer la flexion du genou de manière isolée en utilisant la plupart du temps deux machines : l’une permettant l’exécution du mouvement de flexion du genou, allongé sur le ventre et l’autre permettant la flexion du genou en position assise. Bien que les exercices puissent être réalisés avec une amplitude de flexion du genou complète, la version assise (du fait de la flexion de hanche présente tout au long de l’exercice) place un étirement constant sur les 3 portions bi-articulaires des ischio-jambiers, ce qui implique un travail sur de plus grandes longueurs musculaires, en comparaison à la version allongée sur le ventre. Et de nombreuses études ont tendance à rapporter de meilleurs résultats en hypertrophie lorsque les exercices sont réalisés à de grandes longueurs musculaires. Ces résultats ne sont toutefois pas unanimes, notamment à cause de l’hétérogénéité des protocoles mises en place et des publics participants aux études...

Le fait de s’entraîner régulièrement à de grandes longueurs musculaires limiteraient les dommages musculaires induits par le travail excentrique. Or les dommages musculaires et les déchirures musculaires sembleraient être déclenchés par les contractions excentriques, et des auteurs suggèrent qu’il existerait un lien entre la susceptibilité d’un muscle à subir des dommages musculaires et la probabilité d’une déchirure.

Ainsi, le leg curl assis diminuerait-il les dommages musculaires liés à l’excentrique plus que le leg curl allongé sur le ventre ? Et quelle variante permettrait la plus grande hypertrophie ?

L'étude réalisée

Pour répondre à ces questions, des chercheurs japonais ont mis en place un protocole en 2 phases : la première consistait à comparer les effets de l’entraînement avec leg curl assis et leg curl allongé sur l’hypertrophie des ischio-jambiers durant 12 semaines, et la seconde phase consistait à réaliser une séance exclusivement excentrique et d’analyser les dommages musculaires, pour voir si le programme qui précédait permettrait une meilleure protection du muscle.

Pour la première phase de 12 semaines, les chercheurs ont tout d’abord recruté 20 personnes non-entraînées (7 femmes et 13 hommes). Pour les 20 participants, chaque cuisse était attribuée soit au travail au leg curl assis (90° de flexion de hanche), soit au leg curl allongé (~30° de flexion de hanche). Lors des 2 séances hebdomadaires, ils réalisaient pour chaque cuisse 5 séries de 10 répétitions à 70% du 1RM. Pour évaluer l’hypertrophie musculaire, les chercheurs utilisaient l’image par résonance magnétique (IRM) pour mesurer le volume de chaque muscle composant les ischio-jambiers et du volume global des ischio-jambiers.

Pour la seconde phase, 19 des 20 participants à la phase 1 et 12 participants contrôle (4 femmes et 8 hommes) ont réalisé une séance purement "excentrique" consistant en 3 séries de 10 répétitions à 90% du 1RM, pour chaque jambe, dans chaque condition (leg curl assis et allongé). Avant, 24, 48 et 72 heures après la séance, le 1RM et le temps de relaxation T2 mesuré par IRM (qui dépend de la présence d’œdème et d’inflammation) ont été mesurés.

Résultats & Analyses

Les principaux résultats de cette étude ont montré que 1) l’hypertrophie des ischio-jambiers était supérieure suite à l’entraînement sur leg curl assis pendant 12 semaines, mais 2) qu’il n’y avait aucune preuve que l’entraînement à plus grande longueur musculaire (leg curl assis) ait un effet de protection supérieur contre les dommages musculaires sur les ischio-jambiers.

Après la première phase du protocole, l’hypertrophie totale des ischio-jambiers a augmenté de 14.1% pour le leg curl assis et de 9.3% pour le leg curl allongé. Pour la longue portion du biceps fémorale, le volume musculaire a augmenté de 14.4% pour le leg curl assis et de 6.5% pour le leg curl allongé, pour le semi-tendineux, il a augmenté de 23.6% contre 19.3% et pour le semi-membraneux, il a augmenté de 8.2% contre 3.6%. Aucun changement n’a été observé pour la courte portion du biceps fémoral (mono-articulaire) (+10% vs. +9%). De plus, le biceps fémoral a augmenté plus en volume aux niveaux proximal (+20.8 vs. +8.7%) et distal (+10.7 vs. +5.4%) avec le leg curl assis, et le semi-tendineux a augmenté plus en volume au niveau proximal (+28.2 vs. 21.1%) avec le leg curl assis.

Concernant la seconde phase, le temps de relaxation T2 mesuré par IRM était le plus grand 72 heures après la séance excentrique. L’augmentation de T2 reflète l’inflammation dans le muscle. Il n’existait pas de différence significative entre les deux types de Leg Curl, et ce, pour aucun des muscles composant les ischio-jambiers. Pour le groupe contrôle, c’est-à-dire les participants qui n’avaient pas pris part à la première phase d’entraînement, les valeurs T2 étaient bien plus grandes que pour les autres participants.

Applications pratiques

Cette étude montre encore une fois qu’une variante d’exercice permettant d’entraîner un muscle à grande longueur musculaire, ici le leg curl assis, permettrait d’obtenir une plus grande hypertrophie... chez des débutants. Ce détail est important puisqu’il pourrait expliquer à lui seul pourquoi le volume musculaire a plus augmenté lors du leg curl assis. La tension passive plus grande dans cette variante est probablement la principale responsable à l’origine de cette différence de gains en volume. Le volume musculaire peut augmenter en série et en parallèle. Et lorsque les muscles travaillent sur une plus grande longueur, ils peuvent subir plus ou moins de tension passive, ce qui induit une augmentation du volume en série. Or, c’est principalement observé chez des personnes qui n’ont pas l’habitude de s’entraîner à grande longueur musculaire. Ce phénomène aurait tendance à se réduire avec la pratique et l’augmentation progressive (mais jusqu’à un certain point) du volume musculaire en série. Les chercheurs n’ayant pas pris en compte cette variable, il sera nécessaire que d’autres études avec des pratiquants avancés soient réalisées.

Enfin, l’entraînement régulier permettrait une meilleure protection face aux dommages musculaires, quelle que soit la variante du leg curl, quelle que soit la longueur à laquelle les ischio-jambiers sont entraînés. Cela étant dit, les résultats sont à prendre au conditionnel, puisque la séance « excentrique » réalisée à 90% du 1RM (concentrique) ne représente pas forcément un véritable travail excentrique (> 100% du 1RM concentrique) et ne représente pas forcément les forces excentriques subies par les ischio-jambiers lors d’activités à haute intensité.

Si vous souhaitez comprendre comment choisir correctement ses exercices et le lien avec l’hypertrophie, et que vous souhaitez en savoir plus sur ce que nous préparons pour la rentrée, n’hésitez pas vous abonner à notre newsletter.

Références

  1. Maeo S, Huang M, Wu Y, Sakurai H, Kusagawa Y, Sugiyama T, Kanehisa H and Isaka T. Greater hamstrings muscle hypertrophy but similar damage protection after training at long versus short muscle lengths. Med Sci Sports Exerc 53(4) : 825-837, 2021.

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