Les muscles squelettiques ont la capacité d’adapter leur taille et leurs caractéristiques tension-longueur pour répondre aux exigences fonctionnelles de la vie quotidienne. Durant le développement du corps humain de notre naissance à l’âge adulte, mais également lors d’une activité physique régulière, les muscles squelettiques ont une forte capacité d’adaptation et subissent des modifications tant au niveau de leur architecture que de leurs propriétés contractiles.
Les étirements statiques sont un moyen efficace d’augmenter la tolérance des structures musculaires à l’étirement et par conséquent, améliorent l’amplitude de mouvement articulaire. Et même s’ils peuvent diminuer la performance musculaire qui suit leur réalisation en réduisant la raideur du complexe musculo-tendineux (cet effet est toutefois temporaire et ne durerait pas plus de 30 minutes), leur pratique régulière permettrait toutefois d’améliorer l’efficience de tâches concentrique, excentrique et/ou pliométrique. Il suffit de prendre pour exemple les sports de combats poings-pieds ou la gymnastique.
Depuis quelques années, certaines recherches attirent l'attention sur leur potentiel d'amélioration de la force maximale et de l'hypertrophie musculaire lorsqu'ils sont appliqués pendant plusieurs semaines. Les recherches émergentes suggèrent qu'avec une intensité, un volume et une durée suffisamment élevés, les étirements statiques pourraient servir d'alternative aux méthodes traditionnelles de musculation, en produisant des résultats comparables en termes de force, d'hypertrophie et de mobilité. Il est ainsi nécessaire d'explorer davantage les adaptations morphologiques et fonctionnelles associées aux étirements statiques par rapport à l'entraînement traditionnel de musculation.
Pour tenter d’y voir plus clair, une équipe internationale de chercheurs a exploré les effets d'un programme d'étirements statiques sur la force maximale et l'hypertrophie du grand pectoral et sur la mobilité articulaire de l’épaule, et a comparé ces effets à ceux d'un entraînement traditionnel de musculation. Pour cela, les chercheurs ont recruté 81 personnes physiquement actives qu'ils ont réparti dans 3 groupes : un groupe de 27 personnes qui réalisaient des étirements statiques du grand pectoral, 15 minutes par jour, 4 jours par semaine, pendant 8 semaines ; un groupe de 27 personnes qui réalisait un exercice ciblant le grand pectoral sur machine Pec Deck (5 séries de 10 à 12 répétitions à10-12 RM), 3 fois par semaine ; et un groupe contrôle de 27 personnes qui poursuivaient leurs activités quotidiennes.
Pour l'étirement statique, les participants s'allongeaient sur un banc, les genoux et les hanches fléchis à 90°. Les épaules étaient placées en rotation externe, les bras en abduction de 90° et les coudes fléchis à 90°. Des sangles étaient attachées au niveau des coudes et elles étaient reliée à un capteur de force, de telle sorte que les participants subissaient un étirement maximal du grand petoral. La tension appliquée était mesurée toutes les 10s. Et puisque, suite à l'étirement, la tension mécanique diminuait progressivement au cours des 15 minutes, la sangle était automatiquement réajustée pour maintenir une tension continue.
La force maximale isométrique et l'épaisseur du grand pectoral étaient mesurées avant et après le protocole de 8 semaines. Un test de mobilité articulaire des épaules était également réalisé par tous les participants.
Les résultats de cette étude montrent que des étirements statiques du grand pectoral sont aussi efficaces qu'un exercice de musculation pour améliorer la force isométrique et l'hypertrophie musculaires. Tandis que les étirements statiques sont supérieurs à un exercice de Pec Deck pour améliorer la mobilité articulaire de l'épaule.
Alors que l'entraînement en musculation est une méthode bien établie, les étirements à haute intensité réalisés avec un grand volume montrent des résultats prometteurs dans l'induction de l'hypertrophie et de la force musculaires. La mécanotransduction, et en particulier, l'étirement du segment rigide de la titine sont considérés comme les principaux mécanismes potentiels de l'hypertrophie induite par étirement.
Que ce soit lors d’un étirement ou lors d’une contraction musculaire, la quantité de tension mécanique passive qui est produite par une fibre musculaire est déterminée par l’ampleur de l’étirement du segment rigide de la titine. Ainsi, le nombre de sarcomères qui composent une fibre est déterminant pour la quantité de tension mécanique passive qui peut être générée.
Quand une fibre contient peu de sarcomères, chaque sarcomère est déjà relativement étiré quand le muscle possède une longueur physiologique normale. Donc quand le muscle commence à s’étirer, les sarcomères atteignent très rapidement une grande longueur. Le segment compliant de la titine ne peut plus s’allonger, donc le segment raide doit le faire. Cette phase correspond à la partie descendante de la relation tension-longueur. Cela génère de la tension mécanique passive, ce qui stimule la sarcomérogenèse. La fibre subira une tension mécanique passive avant même que le muscle soit complètement étiré. Et quand ce sera le cas, la fibre subira une encore plus grande quantité de tension passive.
Quand une fibre contient beaucoup de sarcomères, chaque sarcomère sera très court quand le muscle possède une longueur physiologique normale. Les muscles ayant des fibres très longues présentes un “mou” (slack, en anglais). Donc, avant de commencer à générer une tension mécanique passive, il faudra étirer le muscle sur une certaine longueur avant même que chaque sarcomère ne commence à s’étirer (et pour certains muscles et mouvements articulaires, cela n’arrivera tout simplement pas). Le segment raide de la titine s’allonge rarement très loin… donc peu de tension passive et peu ou pas de sarcomérogenèse.
Huit semaines d'étirements statiques à raison de 15 minutes, 4 jours par semaine, effectués pour le grand pectoral induisent des augmentations de la force et de l'hypertrophie musculaire comparables à celles d'un exercice de musculation, et des améliorations supérieures de la mobilité articulaire de l'épaule chez des personnes physiquement actives.
Cependant, l'application pratique de ce type d'étirements reste limitée par des problèmes logistiques, tels que le besoin d'assistance et d'équipement. Réaliser des exercices au poids de corps, avec haltères, élastiques ou machines restent bien plus simple et plus rapide à mettre en place. L'entraînement de musculation est généralement plus efficace et offre des avantages plus larges pour la santé, notamment la prévention de la sarcopénie et de l'ostéoporose et l'amélioration de la santé cardiovasculaire. Les étirements sont très intéressants pour une recherche supérieure d'amplitude articulaire, mais les utiliser pour gagner en force et masse musculaire semble, pour nous, non-optimal.
Nous vous rappelons que vous pouvez citer les articles sous réserve de limiter votre citation à 200 mots maximum et d'inclure un lien nominatif vers celui-ci. Tout autre utilisation, en particulier la copie en totalité sur un forum de discussions, sur un site internet ou tout autre contenu, est strictement interdite.
Copyright © 2011-2025 - www.sci-sport.com - Tous droits réservés